Le programme Jourdain
Le démonstrateur Jourdain par Vendée Eau
Le démonstrateur Jourdain par Vendée Eau
Qu’est-ce qu’un démonstrateur ?
Les démonstrateurs sont des dispositifs expérimentaux de terrain dont le but est de tester, de mettre en évidence et de valider de nouvelles techniques, pratiques, technologies pour évaluer leur potentiel, leur faisabilité et les freins à leur développement.
L’objectif de l’ensemble de la démarche de démonstration (période complète 2018-2027) est de pouvoir évaluer en situation réelle in situ sur plusieurs années, les modalités de fonctionnement et de suivi d’un système de réutilisation indirecte d’eaux usées traitées pour l’eau potable, dans un but final de contribuer à l’évolution de la réglementation, de participer à l’amélioration de l’état de l’art de la REUT, et de permettre à terme la réplication de solutions identiques en France et en Europe sur des territoires sensibles à la pression sur les ressources en eau.
Une approche purement théorique est utopique car elle ne peut répondre à toutes les interrogations avant la mise en place d’une solution REUT à pleine échelle. En effet, la démarche d’évaluer in situ est indispensable au vu des phénomènes très complexes qui interviennent lors d’un rejet dans une masse d’eau, a fortiori dans une retenue (dilution, transfert, hydrolyse/photolyse biodégradation, combinaison avec d’autres éléments, absorption par les systèmes vivants, sédimentation et stratification, …), ainsi que des conditions hydrologiques et météorologiques très variables au droit de la réinjection dans le Jaunay.
Le programme Jourdain est un démonstrateur à ¼ de la capacité potentielle (150 m3/h sur les 600 m3/h disponibles au minimum en sortie de la station d’épuration des Sables d’Olonne). Cette étape va faire l’objet d’une supervision très stricte durant la période de fonctionnement en partenariat avec les autorités sanitaires et environnementales qui accompagnent Vendée Eau depuis plusieurs années pour le cadrage de ce programme, qui ne rentre pas encore dans la réglementation actuelle. Comme la REUT planifiée par recharge de ressource superficielle (dans un but de production d’eau destinée à la consommation humaine) n’a pas d’antécédent en France et en Europe, il est indispensable d’accompagner cette période de fonctionnement par un ensemble d’actions, pour tirer tous les enseignements, pour préparer une extension à pleine échelle et pour de potentielles réplications sur d’autres territoires.
À l’issue de cette étape de « démonstrateur expérimental », le programme Jourdain permettra, après évaluation, d’envisager à terme une augmentation de sa capacité. L’évolution à une solution REUT pérenne à échelle 1/1 permettra de réutiliser 600m3/h d’eaux usées pour la recharge du Jaunay, et de disposer ainsi de l’ordre de 2 millions de m3 complémentaires dans la retenue du Jaunay, offrant une sécurité pour la production d’eau potable.
Pourquoi « Jourdain » ?
Pourquoi « Jourdain » ?
Le nom du programme de REUT de Vendée Eau s’inspire du personnage principal du Bourgeois Gentilhomme de Molière. Au cours d’une leçon avec son maître de philosophie, Monsieur JOURDAIN découvre qu’il fait de la prose sans le savoir : « Par ma foi ! il y a plus de quarante ans que je dis de la prose sans que j’en susse rien, et je vous suis le plus obligé du monde de m’avoir appris cela ». Tout comme pour la prose de M. Jourdain, l’eau que l’on consomme chaque jour a déjà un parcours, une histoire sans qu’on en ait forcément conscience. En effet, de nombreux cours d’eau français et européens reçoivent des rejets de stations d’épuration alors que cette eau en aval, peut être utilisée pour produire de l’eau potable. On fait donc tous, déjà, de la réutilisation des eaux usées sans le savoir, de manière non planifiée. Le programme Jourdain consiste à reproduire ce cycle de l’eau, de manière planifiée, contrôlée et supervisée pour démontrer la compatibilité d’une telle solution pour sécuriser les ressources en eau pour l’eau potable.
Le nom du programme est aussi un clin d’œil au Jourdain, fleuve d’une longueur de 360 km traversant Israël, le Sud-Est du Liban et se jetant dans le lac de Tibériade. Très convoitée par les pays qui le bordent, sa ressource devient limitée. L’État Israélien est devenu un modèle pour sa réutilisation de plus de 90% de son eau potable. Israël qui compte aujourd’hui près de 9 millions d’habitants propose une récupération de 520 millions de m3 d’eaux usées traitées par an. Par exemple, 50 % de son eau recyclée est consacrée à l’arrosage des terres cultivées.
Le schéma du programme Jourdain
Le schéma du programme Jourdain
Les bénéfices du démonstrateur
Les bénéfices du démonstrateur
Sécuriser l’approvisionnement en eau potable
Même si l’expérimentation s’effectue à un débit ¼ de la solution pérenne, le programme permettra déjà un apport d’eau complémentaire dans le lac du Jaunay. Lorsque l’unité d’affinage sera construite, elle alimentera la retenue avec l’équivalent de la consommation d’eau potable de 25 000 vendéens par jour et en fonctionnant toute l’année, le volume réinjecté sera de 960 000 m3/an.
La solution pérenne de réutilisation des eaux usées traitées qui pourra être mise en place grâce au démonstrateur, assurera de l’eau potable pour l’équivalent de 75 000 personnes par jour en rechargeant la retenue du Jaunay avec 3,8 millions de m3 par d’eau par an.
L’eau usée affinée rejetée dans le lac servira uniquement pour le besoin en eau potable car aucun autre prélèvement n’est effectué dans la ressource.
Préserver le milieu naturel ?
En revanche, l’eau n’est pas traitée et réinjectée dans le but de pouvoir augmenter les prélèvements pour l’eau potable mais uniquement pour les sécuriser, notamment en période de sècheresse. Elle permettra donc de substituer à une part des volumes prélevés dans l’environnement pour préserver une plus grande quantité d’eau pour le milieu naturel et participer au soutien d’étiage.
Le programme Jourdain permettra également de favoriser la biodiversité sur la zone de transition végétalisée, prévue pour créer une connexion douce entre le rejet des eaux affinées et la retenue du Jaunay. Au travers de bassins et de méandres végétalisés, la zone abritera une grande diversité d’habitats.
Améliorer les connaissances et l’état de l’art de la REUT
Pour pouvoir mettre en place la solution pérenne de REUT, les bénéfices du démonstrateur sont indispensables. En effet, le programme Jourdain est composé de plusieurs activités qui génèrent des données concrètes sur une solution innovante et inédite en France et en Europe. Les études menées couvrent des domaines très larges pour une application REUT, tels que des techniques de traitement de l’eau et analytiques, de gouvernance, de communication, de modélisation et des aspects sociologiques et économiques. Les résultats de l’expérimentation in-situ contribueront à faire avancer les connaissances et l’état de l’art sur le REUT.
Faire évoluer le cadre réglementaire et favoriser la réplication
La mise à disposition et le partage, des connaissances acquises et du retour d’expérience, fourniront également des clés pour faire évoluer le cadre réglementaire autour de cette thématique et pour inciter d’autres territoires à répliquer cette solution. Le démonstrateur Jourdain est un modèle qui met en avant (et vise à valider) la pratique de la REUT pour l’eau potable. En France le développement de ce type de filière est envisagé dans de nombreuses régions comme un levier face au déficit hydrique actuel ou très probable dans le futur.
Par exemple, en Vendée, le potentiel de réutilisation des eaux des stations côtières représente un volume de 4 à 6 Millions de m3 (soit l’équivalent des principales retenues du nord-ouest comme le Jaunay ou Apremont).
Supporter l’innovation
Au-delà des bénéfices spécifiquement liés à l’état de l’art et la réplication de la REUT, le démonstrateur a pour vocation d’être un support pour l’innovation. Complémentaire au caractère innovant de la solution de REUT elle-même, le programme Jourdain permet, pour différents sujets, de concevoir, d’adapter et d’optimiser des solutions dans le cadre d’une boucle REUT et de contribuer aux avancées scientifiques et technologiques en étant un terrain d’expérimentation. Cette démarche appelée Open Démonstrateur peut prendre différentes formes (partenariats, projets de recherche, AMI, …) et touche l’ensemble des thématiques rencontrées.
Renforcer l’acceptabilité de la REUT
Le démonstrateur étant in-situ et gouverné de façon ouverte, il est soumis aux avis et aux réactions du public. Des actions de communication, de pédagogie et sociales sont donc menées pour renforcer l’acceptabilité de la REUT et permettre de créer une dynamique locale et territoriale, que cela soit au niveau des citoyens et des acteurs de l’eau, sur les sujets des bonnes pratiques de gestion de la ressource et d’économie circulaire de l’eau, dans le but d’élaborer une solution pérenne au-delà de la phase de démonstration.
La gouvernance
La gouvernance
Une plateforme de Gouvernance a été mise en œuvre pour un déroulement du programme Jourdain selon une démarche de portage partagé et d’échanges avec les différentes composantes des acteurs concernés par ce projet. Le schéma de Gouvernance du programme Jourdain permet d’identifier clairement les rôles et les responsabilités de chacun des acteurs de manière à assurer le bon déroulement, la continuité et la mise en œuvre de celui-ci dans des conditions optimales
En particulier, le Comité de Pilotage coprésidé par le président de Vendée Eau et le préfet de la Vendée, et qui réunit les partenaires financiers du programme (l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne, le Conseil Régional Pays-de-la-Loire et le Conseil Départemental de la Vendée), permet de mener les grandes orientations stratégiques et d’accompagner politiquement le bon déroulement des différentes actions.
Sur la première tranche du programme (2018-2022), plus d’une douzaine de réunions des instances de gouvernances se sont tenues.
Sur la thématique de la concertation, le programme Jourdain est un objet intermédiaire de démonstration dont la période d’expérimentation (2022-2026) permettra d’investiguer les impacts sociologiques d’une telle solution et offrira les conditions d’une concertation pour préparer la solution REUT pérenne au-delà de 2026.
Le budget
Le budget
Les enjeux du démonstrateur Jourdain dépassent largement le territoire de l’ouest vendéen, et nécessitent un projet ambitieux, porté par une collectivité forte et prête à un investissement propre important, mais qui doit être accompagné sur l’ensemble de ses composantes, par des partenaires financiers, pour contribuer à faire de cette solution d’avenir une réalité sur le territoire français.
Le programme Jourdain s’entend comme un démonstrateur avec un ensemble d’installations de taille importante (unité d’affinage, canalisation de transfert, zone de transition végétalisée) et un ensemble de démarches d’études et programmes de recherche associés, destinés :
- avant la mise en service des installations :
à définir et dimensionner les infrastructures, réaliser les études préalables (dont : AMO, Moe, campagnes analytiques, dossiers réglementaires, mise en place et animation de la gouvernance…)
- après la mise en service des installations :
à assurer le fonctionnement de l’ensemble des étapes du démonstrateur, mener des travaux d’innovation et recherche sur certaines composantes du projet, mesurer les impacts de la réinjection des eaux sur le milieu, évaluer les impacts économiques et sociaux d’une telle solution innovante d’économie circulaire, …
Le montant global du programme Jourdain est estimé à environ 24,5 millions d’euros
sur une durée globale de 10 ans (2018-2027), dont :
- 3 M€ d’études préalables
- 14.5 M€ pour la construction des infrastructures (unité d’affinage, poste de pompage, canalisation de transfert et zone de transition végétalisée)
- 7 M€ pour le fonctionnement, les études, les démarches d’évaluation et programmes de recherche durant la phase de fonctionnement des installations pour un bilan final destiné à apporter les éléments nécessaires à une possible réplication de cette solution.
1ere tranche du programme Jourdain : (2018-2021)
À mi-parcours, l’ensemble des actions engagées sur la période 2018-2022 représente un investissement cumulé de l’ordre de 9 M€.
La première tranche du programme a été co-financée à un niveau très satisfaisant grâce à l’engagement fort de plusieurs partenaires. Au premier rang desquels l’Agence de l’Eau Loire-Bretagne joue un rôle central dans le paysage français des financements, pour accompagner tout projet d’innovation dans le domaine de l’eau.
Cela représente un taux de co-financement de l’ordre de 67% sur la première moitié du programme, soit un auto-financement de la collectivité Vendée Eau de 33% (environ 3 M€).
Le marché de construction de l’unité d’affinage prévoit qu’une convention de recherche soit coportée par Vendée Eau et le groupement d’entreprises mené par Veolia pour mener des actions de R&D sur les technologies des filières de traitement. Cela représente un montant supplémentaire de l’ordre de 1,05 M€ investis au titre de l’expérimentation, supportés à 15% par Vendée Eau et à 85% par le groupe Veolia. Ce montant n’est pas intégré dans le budget global du programme Jourdain.
2e tranche du programme Jourdain : (2022-2027)
Au global, la deuxième tranche du programme Jourdain représente un investissement nécessaire de l’ordre de plus de 15 M€.
Sur ce montant, le taux d’auto-financement de Vendée Eau est de l’ordre de 9 M€ (59%) et les co-financements apportent un peu plus de 6 M€ (41%).
L’Agence de l’Eau Loire-Bretagne, la Région des Pays de la Loire, le Département de la Vendée, continuent leur appui fort à ce projet, en complément desquels, le Fonds National d’Aménagement et de Développement du Territoire (FNADT) vient également contribuer.
Au global, sur un budget de 24.5 M€, le taux d’auto-financement de Vendée Eau est de 49% (12.08 M€) et le total des subventions publiques est de 51% (12.38 M€).
La règlementation
La règlementation
Dès 2013, le préfet de la Vendée a sollicité la Direction Générale de la Santé sur la faisabilité d’une solution REUT en Vendée pour un usage final d’eau potable. A la suite de cette demande l’ANSES (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a produit une note de cadrage en janvier 2016 destinée à fournir les lignes directrices d’un tel programme, notamment en termes de suivi analytique.
Depuis cette note, Vendée Eau travaille en étroite collaboration avec les services de la Direction Territoriale et de la Mer de Vendée (DDTM85), ainsi qu’avec l’Agence Régionale de Santé des Pays de la Loire – délégation de la Vendée (ARS85) afin de définir le cadre réglementaire adapté à la mise en œuvre et au fonctionnement expérimental du démonstrateur Jourdain. Ces services (DDTM85 et ARS85) ont produit une note de cadrage réglementaire en 2017, mise à jour en décembre 2020, qui fournit l’ensemble des démarches à engager.
Depuis le début du projet, les procédures réglementaires engagées sont les suivantes :
Pour la construction de l’unité d’affinage et les modifications des conditions de rejet en mer des eaux usées de la station d’épuration des Sables d’Olonne Agglomération
- Au titre du code de l’urbanisme, le permis de construire de l’unité d’affinage a été délivré en novembre 2021.
- Un porté à connaissance a été transmis au préfet de la Vendée en février 2022 concernant la modification des modalités du rejet des eaux de la station d’épuration des Sables d’Olonne dans l’émissaire de la station d’épuration.
- Une convention entre l’Agglomération des Sables d’Olonne et Vendée Eau a été établie afin de définir les conditions de mise à disposition des eaux traitées de la station d’épuration avant affinage et les obligations de chaque collectivité.
Pour la mise en œuvre de la canalisation de transfert, l’aménagement d’une Zone de Transition Végétalisée et la réinjection des eaux dans la retenue du Jaunay sur une durée limitée de 3 à 5 ans
- L’Autorité Environnementale a conclu par arrêté du préfet de Région Pays de la Loire à l’exigence d’établissement d’une évaluation environnementale. Ce projet est soumis à autorisation environnementale supplétive, les aménagements ne relevant que du régime de la déclaration au titre de la loi sur l’eau.
- Cette demande déposée en mai 2022, comprendra une phase d’enquête publique. Durant la phase d’enquête de 1 mois, le public sera amené à se prononcer sur le projet d’expérimentation au vu d’un dossier de présentation complet des composantes du projet et d’évaluation de ses effets sur l’environnement.