Pourquoi la REUT en Vendée ?
Qu’est-ce que la REUT
Qu’est-ce que la REUT
La REUT (réutilisation des eaux usées traitées) c’est avant tout une histoire d’économie circulaire. Cette pratique consiste à valoriser des eaux en sortie de station d’épuration pour des usages multiples. L’objectif est de valoriser cette ressource naturelle et de prendre conscience de sa rareté. Il existe déjà quelques exemples de REUT en France comme l’arrosage des golfs, l’irrigation des espaces verts, et bientôt la réutilisation des eaux usées traitées pour l’eau potable avec le programme Jourdain. La REUT est une solution pérenne dans le temps et efficace pour les générations futures. Nous savons tous que nos usages de l’eau s’inscrivent dans le cycle de l’eau, aujourd’hui nous pouvons en faire une réalité.
Les différents types de REUT
Les différents types de REUT
La réutilisation des eaux dans le monde
La réutilisation des eaux dans le monde
La réutilisation des eaux usées traitées, également connue sous les termes de recyclage ou de « water reuse » en anglais, est une pratique ancienne. Elle a pendant longtemps été associée à des risques importants pour la santé publique. Les solutions de traitement des eaux, associées à d’autres barrières sanitaires, ont très grandement contribué à sa sécurisation.
Depuis, réutiliser ou recycler les eaux en sortie des stations d’épuration est devenue une pratique courante dans de nombreux pays qui sont parvenus à la mettre en place de manière sécurisée : l’Espagne ou encore Israël réutilisent respectivement près de 20% et de 80% de leurs eaux usées. Ces pays sont aujourd’hui leaders sur la thématique en Europe et en Méditerranée, leur permettant ainsi de réaliser des économies d’eau conséquentes.
La FAO estime que la réutilisation des eaux ne concerne qu’entre 2 et 4% des eaux actuellement traitées, soit entre 4 et 8 milliards de m3 par an.
Si plusieurs ré-usages peuvent être envisagés et mis en œuvre pour ces eaux, l’irrigation agricole reste à ce jour majoritaire. En France, où l’on estime que moins de 1% des eaux usées traitées sont réutilisées, les eaux de la station de Clermont-Ferrand sont ainsi réutilisées depuis les années 90 pour irriguer près de 1 000 Ha agricoles. Une étude épidémiologique menée à l’époque a mise en évidence l’absence d’impact sanitaire. Sur le même principe, sur l’île de Noirmoutier les eaux traitées servent à l’irrigation maraichère depuis les années 80. Par ailleurs en France et en Méditerranée de nombreux golfs utilisent des eaux usées traitées pour leur arrosage, c’est entre autres le cas à Royan (17), à Sainte-Maxime (83) ou encore à Rhuys-Kerver (56). En Catalogne ou encore au Maroc les références pour l’arrosage de golf sont encore plus nombreuses.
Outre l’irrigation et l’arrosage, la réutilisation des eaux pour produire de l’eau potable, également connue sous le terme anglais de « potable reuse », est une pratique existante et sécurisée. Les villes de Windhoek en Namibie (depuis 1969) et de Singapour (depuis 2003) sont souvent citées comme des exemples de réussite dans ce domaine, réutilisant respectivement 7,6 et 194 Millions de m3 par an, soit plus d’un tiers de leurs besoins en eau potable. Ces villes ont mis en place des technologies de pointe pour traiter les eaux usées et les purifier à un niveau suffisamment élevé pour être consommées en toute sécurité.
A Windhoek, unique exemple mondial de « direct potable reuse », les eaux traitées sont injectées directement dans le réseau de distribution d’eau potable, pour un ratio global de 1/3 d’eaux traitées et de 2/3 d’eaux conventionnelles.
A Singapour, l’eau purifiée transite par des retenues d’eau conventionnelle où l’eau est ensuite prélevée pour être potabilisée : il s’agit « d’indirect potable reuse », l’eau est également distribuée en bouteille sous le nom de « NEWater ».
Autre exemple, en Californie le projet Pure Water a pour objectif de couvrir près de la moitié des besoins en eau potable de la ville de San Diego en 2035. L’eau « purifiée » en sortie de la station d’épuration est infiltrée dans la nappe, avant d’être potabilisée. Par ailleurs, l’eau usée traitée est réutilisée depuis 1961 pour des usages urbains, commerciaux et industriels.
En Europe, la réutilisation d’eau pour la production d’eau potable n’existe pas sur un périmètre aussi restreint que celui de Jourdain. A Torreele en Belgique la réutilisation d’eau est réalisée par la recharge d’une nappe en amont de prélèvements d’eau potable. A Prague, la microbrasserie Čížová a produit 15 hectolitres de bières à partir d’eaux usées traitées dans un objectif de sensibilisation.
La réutilisation des eaux usées est une pratique ancienne qui a évolué au fil du temps pour devenir une solution viable dans la gestion de l’eau. Avec des avancées technologiques et des réglementations strictes, de nombreux pays ont réussi à sécuriser cette pratique, que ce soit pour l’irrigation, pour la production d’eau potable, ou encore pour différents usages urbains tels que le nettoyage de voiries ou de véhicules.
Le constat – Pourquoi la réutilisation des eaux en Vendée ?
Le constat – Pourquoi la réutilisation des eaux en Vendée ?
En Vendée, l’eau potable provient à 94 % des eaux superficielles contre 30 % en moyenne en France. Grâce à 13 barrages sur les cours d’eau du département, les retenues ainsi créées permettent de disposer de 55 Mm3 stockées pour la production d’eau potable. Cette ressource est désormais fortement sous tension en raison des épisodes de sécheresse qui s’aggravent avec les effets du dérèglement climatique et la demande en augmentation croissante sur le département du fait de son attractivité avec un effet particulièrement marqué sur la zone littorale en raison des activités touristiques.
A l’horizon 2030 le déficit hydrique estival entre les mois de mai et d’octobre est estimé à 8,2 millions de m3 pour une année sèche et caniculaire sur les secteurs côtiers nord et sud. Près de 100 000 vendéens sont concernés.
Face aux déficits hydriques récurrents et exacerbés dans le futur Vendée Eau, le service public de l’eau potable en Vendée a mis en place une approche multi-leviers dite « bouquet de solutions » développée dans le Plan de sécurisation de l’alimentation en eau potable (PSAEP) du Schéma Directeur Eau Potable de 2010 et actualisée en 2021.
Le bouquet de solutions prévoit ainsi la mobilisation de solutions « conventionnelles » telles que les économies d’eau, la lutte contre le gaspillage la réduction des fuites, la mise en place d’une gestion structurée et économe de la ressource, l’optimisation des unités de traitement et l’amélioration des performances des réseaux de distribution mais également la mise en place de retenues de stockage, le transfert depuis d’autres territoires, ou encore la création de nouveaux forages. Mais ces solutions conventionnelles ne sont pas suffisantes pour combler le déficit.
Des solutions innovantes et non conventionnelles ont ainsi été envisagées telles que le dessalement d’eau de mer et la réutilisation des eaux usée traitées. Le dessalement d’eau de mer apparait très contraignant des points de vue environnementaux et économiques, considérant entre autres les importantes consommations énergétiques requises, près de 10 fois supérieures à la réutilisation des eaux. La solution de réutilisation des eaux usées traitées (REUT) a dont été retenue par Vendée Eau.
Le potentiel – Quelle capacité pour les stations vendéennes ?
Le potentiel – Quelle capacité pour les stations vendéennes ?
La Vendée compte 325 stations d’épuration collectives urbaines soit un gisement total de 48,6 millions de m3 par an. 305 stations sont situées sur des communes rurales et disposent de faibles capacités (inférieurs à 10 000 EH) avec des volumes d’eau rejetés faibles, inférieurs à 2 000 m3/jour par station.
Parmi les stations de plus grande capacité huit sont situées sur la zone littorale en fort déficit hydrique. Ces huit stations représentent 24% du volumes total d’eau traitée en Vendée, soit 11,7 millions de m3 par an : ces eaux douces traitées sont rejetées directement dans l’océan, et considérées en partie comme « gaspillées » pour le territoire.
Les solutions envisageables – Comment et où appliquer la REUT ?
Les solutions envisageables – Comment et où appliquer la REUT ?
La réutilisation des eaux consiste à valoriser des eaux en sortie de station d’épuration pour un ou plusieurs usages bénéfiques, et ainsi à limiter les impacts du rejet sur le milieu récepteur. La pratique est à ce jour autorisée et réglementée en France pour des usages d’irrigation agricole, d’espaces verts et de golf. Mais d’autres usages comme l’eau potable sont possibles et à l’étude en France et en Europe.
L’objectif pour Vendée Eau est d’augmenter et de sécuriser la ressource disponible pour les usines de production d’eau potable, tout en préservant l’intégrité des milieux naturels. La REUT peut ainsi prendre plusieurs formes permettant de cibler cet objectif :
La production directe d’eau potable à partir d’eau de station d’épuration ; mais cette pratique, bien que déjà mise en œuvre dans des pays comme Singapour ou la Namibie, apparait très complexe à mettre en œuvre pour des questions sanitaires, réglementaires et de perception sociale ;
La recharge de ressources naturelles qui alimentent les usines de production d’eau potable ; cette forme de réutilisation des eaux a été retenue par Vendée Eau
La recharge artificielle de milieux pour la production indirecte d’eau potable consiste à transférer les eaux traitées depuis une station d’épuration vers une ressource primaire utilisée pour la production d’eau potable. La ressource primaire peut être une nappe souterraine ou une ressource superficielle. En Vendée les principales ressources en eau pour la production d’eau potable sont des retenues superficielles, les nappes représentent des gisements faibles en comparaison.
Trois retenues superficielles situées sur la zone côtière apparaissent prioritaires : la retenue du Jaunay (5,3 Millions de m3/an), la retenue de Finfarine (2,6 Millions de m3/an) et la retenue d’Apremont (8,2 Millions de m3/an). La retenue du Jaunay présente le plus fort déficit en année sèche déficitaire, entre 2 et 2,5 Millions de m3/an, contre 1,5 Millions de m3/an pour Apremont.
La station d’épuration des Sables d’Olonne (5,7 Millions de m3/an) a été préférée à la station de Saint Gilles Croix de Vie (2,7 Millions de m3/an) pour alimenter la retenue du Jaunay. En effet, à moyen terme, la station de Saint Gilles Croix de Vie pourrait alimenter la retenue d’Apremont sur le même modèle. Ces deux projets sont complémentaires et compatibles pour lutter contre le déficit en eau potable croissant à l’horizon 2030-2050 sur le territoire vendéen.
La solution retenue – Vers un démonstrateur de réutilisation des eaux sur le site du Jaunay
La solution retenue – Vers un démonstrateur de réutilisation des eaux sur le site du Jaunay
Vendée Eau a donc décidé en 2014 de prioriser la station des Sables d’Olonne pour alimenter la retenue du Jaunay. La pratique de réutilisation des eaux usées traitées pour la production indirecte d’eau potable, via la recharge de ressource superficielle, n’existe pas par ailleurs en France et en Europe et ne bénéficie d’aucun cadre réglementaire spécifique à cet usage. Considérant cela, ainsi que les enjeux environnementaux, sanitaires, et sociaux associés, Vendée Eau a décidé en 2014 d’initié le programme Jourdain : un démonstrateur grandeur nature à ¼ du débit possible.
Ce démonstrateur doit contribuer à faire évoluer les cadres réglementaires français et européens, et à initier la réplication de ces pratiques en Vendée, en France et en Europe. Localement il doit également permettre de s’assurer que les impacts environnementaux et sanitaires sont maîtrisés.
Enfin, ce démonstrateur sera l’outil permettant d’améliorer l’état de l’art de la REUT en France (retours d’expérience, bonnes pratiques,), de mener des actions de pédagogie, et de construire les bases d’une solution pérenne à 100% du débit disponible.